En quête d'un officier
- Philippe ALEXANDRE
- 21 nov. 2023
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 23 nov. 2023
Les indices
Tout commence quand ma "cousine" californienne me demande si je connais la branche Freyler. Elle me confirme que sa grand-mère française Marie-Louise qui a émigré aux Etats-Unis en 1917 lui en avait parlé comme étant des cousins de sa mère Jeanne Guichard.
Jeanne Guichard est ma propre arrière-arrière-grand-mère et figure également dans mon arbre. Bien sûr je n'en ai jamais entendu parlé de ces Freyler. J'ai déjà eu du mal à retrouver cette Marie Louise, la soeur de mon arrière-grand-père.
Toute cette branche familiale est girondine, et plus particulièrement originaire de Lormont, la banlieue bordelaise en face du pont de pierre. Ce patronyme de Freyler me semble bien étranger à cette région. Ce sera sûrement soit une aide car peu de personnes porteur du patronyme soit une complication car originaire d'ailleurs.
Mes seuls indices de départ pour retrouver des traces de cet officier français est cette photographie de trois jeunes communiants, deux jeunes filles et un jeune garçon :

Myheritage nous donne un premier indice avec son nouveau module PhotoDater™, il date la photographie de 1929 environ avec une précision de 94%.
L'autre indice est cette carte de visite annotée de la main du fils de Marie-Louise :

On a maintenant un prénom Georges, un lien de parenté : ce serait un oncle de Marie-Louise, et une profession : un officier de l'armée française.
La recherche
Une recherche rapide sur FILAE pour Georges Freyler en Gironde nous donne un mariage de Georges (Jean André) mécanicien, soldat de réserve, fils de Pierre Freyler et de Marie Amélia Couderc avec Marie Canteloup le 17 juin 1911 à Bordeaux.
Et un détail saute aux yeux, c'est la similitude d'adresse du marié célibataire sur l'acte de mariage avec celle de la carte de visite : Le n°27 rue des augustins à Bordeaux

Pas de doute, on a bien trouvé la fameuse branche Freyler. Georges n'est pas officier juste soldat et réserviste. Donc il reste à trouver cet officier et le lien de cousinage.
Pour le lien familial, FILAE (encore lui) nous donne une première piste en l'interrogeant sur les Freyler à Lormont. Nous trouvons un Jacques Freyler mariée à une Marie Point qui donnent naissance à une Anne Marie Henriette le 10 janvier 1850 à Lormont.
La mère de Jeanne Guichard (Donc la grand-mère de Marie-Louise) est Jeanne Marguerite Point épouse de Pierre Guichard. Même si je n'ai pas établi un lien entre les deux femmes Point. La présomption d'appartenance à la même famille est forte.
Comme pressenti, Freyler n'est pas bordelais, mais plutôt d'origine bavaroise comme le confirme cet extrait du réveil Bordelais du 16 décembre 1866 :

Ainsi que le recensement de 1876 à Bordeaux au 152 route d'Espagne, qui mentionne Jacques Freyler comme d'origine allemande et qui a été naturalisé :

En continuant les recherches je fais également le lien entre Jacques Freyler époux de marie Point et notre Georges Freyler, son petit-fils. Ce qui donne la famille suivante :

Georges a un frère Jacques Gabriel. et celui-ci est bien officier dans l'armée française. C'est notre homme et voici son parcours militaire.
L'officier de l'armée française

Né le 12 décembre 1877, il devance sa classe et s'engage volontairement un an avant en 1896 pour quatre ans. Il va rester dans l'armée de 1896 à 1918 en prolongeant de deux ans en 1900 puis pour trois ans en 1901. Après avoir fait l'école des sous-officiers, il obtient le grade de sous-lieutenant pour finir capitaine en 1918.
Il va successivement servir dans les régiments suivants :
34e régiment d’infanterie : Soldat 2e classe, Caporal, Sergent fourrier, Sergent
62e régiment d’infanterie : Sous-Lieutenant,
70e régiment d’infanterie : Lieutenant
146e régiment d’infanterie : Capitaine


Aprés son service d'active, il va être nommé au bureau du recrutement de Bergerac, puis un peu plus tard à celui de Montluçon.

Voici la fiche de ses états de service à son arrivée au bureau de recrutement.
Le parcours de jacques Freyler est exemplaire, il finira Lieutenant-colonel. Mais ses états de service montre aussi qu'il a été blessé grièvement :

Il est blessé le 16 avril 1917 à Chivy au sud-est de Laôn dans l'Aisne :
Plaie en séton de la cuisse gauche par balle. amputation cuisse droite (suite blessure par balle)
− En séton. Blessure, plaie en séton. Blessure, plaie qui a un trajet sous-cutané et qui comporte deux orifices, provoquée par une arme blanche, un projectile ou un corps étranger. (Source La Langue Française)
Ses états de service lors de la bataille de Verdun et son attitude au combat notamment son sens du devoir, son dévouement, sa bravoure, son calme et autorité dans le commandement, sa clairvoyance et son sang-froid lui vaudront la croix de guerre, une palme, une étoile d'argent et la légion d'honneur qui lui seront décernés. Il sera élevé au plus haut grade de commandeur de la légion d'honneur en 1952, quatre ans avant son décès.

L'histoire de Jacques Gabriel ne s'arrête pas là puisque il sera finalement amputé de sa seconde jambe comme le montre ce document.

Jacques Gabriel aura trois enfants deux garçons et une fille. Il s'eteindra en 1956 à Bordeaux. Le hasard de la vie fera que mon grand-père paternel et ce Jacques Gabriel serviront dans le même régiment pendant la première guerre mondiale au 146e régiment d'infanterie, vingt avant que les parents ne se rencontrent.
Epilogue
Nous avons retrouvé la famille Freyler, identifié une piste qui la relie probablement à ma famille, découvert un fier et valeureux officier de l'armée française et descendant d'une famille allemande de surcroit. D'ailleurs la mémoire familiale et notamment ma mère m'a toujours parlé d'un militaire amputé des deux jambes pensant que c'était son grand-père maternel. Serait-ce lui ? Comme quoi il n'y a pas de fumée sans feu.
Reste à identifier les jeunes communiants : Georges Freyler n'a eu qu'une seule fille Marguerite Marie Micheline née en 1912, Jacques Gabriel n'a eu aussi qu'une seule fille Jeanne Yvette Marie née en 1913, et deux garçons nés en 1909 pour Georges Allain Jean et en 1911 pour André Jean Léon. La communion solennelle se fait à l'âge de 12 ans environ donc compte tenu de l'âge des enfants, la photographie doit dater de 1924-1925. Les deux enfants à l'exterieur semblent plus âgés donc je fait le pari de gauche à droite : Marguerite Freyler, Jeanne Freyler, André Freyler.





Belle enquête!😊
Félicitations ! Un bel exemple de recherches !
Belle recherche familiale.
Beau travail de recherche, très pro, autant que je puisse en juger. 🙂
Très beau travail de recherche à partir d'un nom et d'une photo 😀